Fond musical : "Copains d'abord" Brassens, Moustache
Il est né à Méréville (Seine et Oise) le 25 juin 1919, d'un père pharmacien et d'une mère enseignante, directrice de l'école de Méréville. Elève brillant, il étudia au lycée Henri IV, puis y devint professeur.
Il obtint l'agrégation de Lettres en 1945, et deux mois plus tard, ce fut ...
Mon Village à l'heure allemande Prix Goncourt 1945 ed. Flammarion
«...Jumainville ( ... ) rien de plus, rien de moins que n'importe quel village français: un château, une rivière. Comme partout, une place du marché, sans marché, avec des arbres en rond,
des chemins creux fréquentés les soirs de printemps, à partir de dix heures ...
Et aussi des champs étalés autour du village avec des fermes. (..)
Le jour se levait derrière le clocher d'encre, l'aile du ciel blanchissait, les vitres prenaient des transparences de sources.
Du clocher ratatiné, sans élan, s'égouttèrent quelques grosses notes de bronze: c'était l'heure allemande.
Mais les Alliés avaient débarqué ... » Jean-Louis Bory - 1945
Jumainville c'était "Méréville au temps des Schleus, Mâche-paille et Bouffe-saucisses" (sic) ...
La Vélize c'était la Juine auprès de laquelle il a vécu, il s'est endormi. D'ailleurs si nous avons choisi cette version de la couverture du livre *, c'est que le profil du fameux clocher de Jumainville ne laisse planer aucun doute: c'est bien St Père !
L'empreinte qu'il a laissé avec cette oeuvre, a marqué à jamais le village, car bien sûr chacun y reconnut ses joies et ses peines, les gens qu'ils aimaient, ceux qu'ils n'aimaient pas ...
Ce prix ne fut pas comme le diront certains, "un Goncourt de circonstance" en 1945, mais bien une oeuvre marquante sur l'étude des personnalités de gens du monde rural, en ce dernier trimestre d'occupation, au milieu du XXe siècle.
D'autres suivront, et on ne peut s'empêcher de penser aux "Bidochons" ... nul doute que l'esprit Bory est toujours là ... mais en poésie et en finesse, rien ne vaut "son village".
* Note de l'auteur de ces lignes: On trouve facilement "Mon Village" en occasion sur internet, et il faut le lire (désolé, je ne le prête plus car on ne me le rend pas !)
Pour ma part, l'ouvrant un soir au chevet ... je n'ai pu le refermer avant ces dernières lignes:
C'était l'heure allemande... "Quel jour sommes-nous ? demanda Marcel... Mardi 6 juin répondit Elisa. " Méréville 1944.
Parmi ceux aimaient Bory, il y eut l'écrivain Geneviève Dormann (Le Bal du Dodo, le Bateau du Courrier, Amoureuse Colette.. ) qui mieux que quiconque nous fait découvrir qui était Jean-Louis, son ami d'enfance.
Elle, la fille du Député, fuyait la grande ville (Etampes) pour venir retrouver ses amis de Méréville ... l'écrivain, fils du Pharmacien (Bory) et le peintre, fils du Médecin (Caracostea).
« Nous avions en commun, entre autres choses, la Beauce: Mon père (Maurice Dormann) est né à Etrechy, ma mère à Etampes. Méréville fait partie de mon enfance. Mon père fut député de ce Canton et nous avions une maison de campagne, tout à côté, à Boigny (Hameau de Méréville). Comme tous les parlementaires, mon père assistait aux distributions de prix et c'est ainsi, me raconta Jean-Louis, plus tard, que mon père lui posait des couronnes de lauriers sur la tête. Dans son livre, "Un prix d'excellence ", publié après sa mort, Jean-Louis raconte ces distributions de prix et décrit mon pauvre papa - grand mutilé de la guerre 14 - sous le nom de Mandore (anagramme de Dormann). [...]
De Méréville, nous avions, Jean-Louis et moi une grande complicité: évocations de ses habitants les plus pittoresques - et Dieu sait s'il y en a - accents, expressions, etc ...
Plus tard j'ai épousé le peintre Philippe Lejeune, fils de l'ancien maire d'Etampes et ami de Philippe CaraCostea* avec qui il avait partagé, dans les années 50, un séjour à Tahiti, sur les traces de Gauguin. [...]
Chaque fois que je le pouvais, je prenais ma moto et je fonçais à Méréville où je me sentais bien. La mère de Jean-Louis, assez revêche, me faisait peur, mais son père me faisait rire. Un extraordinaire pharmacien qui avait horreur des médicaments. On avait toujours l'impression de le déranger quand on lui apportait une ordonnance. Il arrivait en grognant du fond de son jardin, en essuyant ses mains pleines de terre sur sa blouse, saisissait l'ordonnance avec un air de grand mépris et, à contre coeur, délivrait les médicaments en haussant les épaules : "vous n'allez pas avaler tout ça ! ".
Méréville est l'un des endroits au monde que je préfère. C'est pour moi, un village mystérieux, je dirais même tellurique qui secrète, attire des personnages hors du commun et provoque toujours des situations curieuses.
Et que dire de l'extraordinaire bonne de Jean-Louis, beauceronne, qui avait été "pute" à Brooklyn (New-York) et qu'il n'appelait que la Brooklyn ! » (La peau des Zèbres).
Geneviève DORMANN - écrivain (texte mis à disposition par la SHACM)